Pakistan : SFI enquête plus en profondeur sur la plainte des travailleurs du barrage suite à un licenciement massif

Les travailleurs du projet hydroélectrique de Karot, dans le nord du Pakistan, ont obtenu le droit à une enquête complète concernant une plainte qu'ils ont déposée devant la Société financière internationale (SFI) pour violation de la liberté d'association, de la santé et de la sécurité et d'autres règles du travail. La décision de mener une enquête plus approfondie a été prise après que 2 410 travailleurs ont été licenciés en décembre 2021 sans consultation préalable du syndicat ou du département du travail pakistanais.


Lesdits travailleurs sont membres du syndicat Awami Labor Union, qui fait partie de Pakistan Federation of Building and Wood Workers (PFBWW), affiliée à l'IBB. Le secrétaire général de la PFBWW, Aslam Adil, a déclaré qu'ils n'avaient reçu aucune explication concernant ce licenciement collectif, si ce n'est que l'entrepreneur a déclaré que 25 cadres chinois étaient "tombés malades du COVID-19".  


"Pendant des années, les travailleurs ont dénoncé la façon dont ils sont traités. Même si beaucoup de nos membres ont contracté le COVID-19, le travail ne s'est jamais arrêté pour eux. Il y a eu des violations constantes du droit du travail pakistanais, des normes internationales du travail et des règles du travail de la SFI." Le licenciement massif et illégal de travailleurs est le dernier de ces abus. Les mots nous manquent pour les travailleurs qui se sont retrouvés sans emploi ni revenu en pleine pandémie", a déclaré Adil.

 

Karot est un projet hydroélectrique de 720 MW construit par une filiale locale de la China Three Gorges Corporation, cofinancé par International Financing Corporation, la branche de la Banque mondiale spécialisée dans le capital-investissement.  


L'évaluation initiale de la conformité a identifié des conditions de vie inférieures aux normes dans les logements des travailleurs, des mauvaises pratiques en matière de sécurité sur le lieu de travail, une discrimination entre les travailleurs chinois et pakistanais et des limitations du droit à la liberté d'association, qui correspondent à celles soulevées dans les plaintes de la PFBWW et de l'IBB.


La plainte de la PFBWW et de l'IBB a également mis en évidence la manière dont l'entreprise a fait échouer l'enregistrement du syndicat du site, tandis qu'un syndicat pro-patronal qui ne représentait pas les travailleurs a été rapidement enregistré, empêchant le syndicat ALU de représenter les travailleurs.  

Les membres et les responsables de ALU ont également été menacés à plusieurs reprises par la direction. Une présence militaire importante sur le site a donné un poids supplémentaire à ces menaces et a rendu difficile pour les travailleurs de soulever d'autres problèmes liés au lieu de travail et aux conditions de vie auxquels ils étaient confrontés.  


La plainte allègue des violations des "normes de performance" de la SFI, des règles que les entreprises travaillant sur les projets de la SFI doivent respecter, couvrant les normes sociales et environnementales. Le critère de performance 2 porte sur le travail et les conditions de travail. "La décision de l'organe de surveillance de la SFI, le CAO (Compliance Advisor Ombudsman), d'enquêter de manière approfondie sur le traitement des travailleurs du projet de barrage de Karot est bienvenue. Cela renforcera sa crédibilité en tant qu'investisseur international dans les grands projets d'infrastructure", a déclaré Apolinar Tolentino, représentant régional de l'IBB pour l'Asie-Pacifique.


Cependant, l'IBB craint que les travailleurs du projet ne bénéficient pas à temps de la réparation attendue de l'enquête. Elle explique que les directives du CAO requièrent que le projet de rapport d'enquête soit achevé dans un délai d'un an. Cependant, il ne reste que 3 mois avant que le projet ne soit complètement achevé, ce qui rend difficile le contact avec les travailleurs, dont beaucoup sont des travailleurs migrants internes. 


En réponse, l'IBB a demandé à Makhtar Diop, directeur général et vice-président exécutif de la SFI, d'ordonner immédiatement l'amélioration et la réparation appropriées des conditions de travail et d'emploi du projet, y compris le versement d'indemnités de licenciement légales aux travailleurs injustement licenciés, étant donné que le projet doit être achevé avant le premier semestre de cette année.  


Les directives du CAO requièrent que le projet de rapport d'enquête soit achevé dans un délai d'un an et diffusé aux plaignants et à la SFI, qui peuvent soumettre des commentaires avant que le CAO ne soumette son rapport final au conseil d'administration et à la direction de la SFI.  


Si le CAO constate une non-conformité aux critères de performance, la SFI doit expliquer comment elle va traiter ces problèmes.