Les Syndicats Mondiaux dénoncent la décision du gouvernement américain de se retirer du PMM de l'ONU

18 December 2017 13:24

 

Le Conseil Mondial des syndicats (CGU) dénonce la décision du gouvernement des Etats-Unis prise le 3 décembre 2017 de se retirer du processus du Pacte Mondial sur la Migration. La décision a été prise à la veille de la réunion de trois jours des Nations Unies à Puerto Vallarta, au Mexique, organisée pour avancer les discussions menant à l'adoption du Compact Mondial en 2018. En annonçant le retrait des États-Unis du processus, l'ambassadeur aux Nations Unies, Niki Haley a déclaré que "l'approche globale [adoptée pour la négociation du Compact] n'est pas compatible avec la souveraineté du pays".

"Cette décision est à la fois regrettable et contre-productive, et place les Etats-Unis du mauvais côté de l'histoire", a commenté Ambet Yuson, président du groupe de travail du CGU sur la migration. "Cela arrive à un moment où les gouvernements du monde, les agences des Nations Unies, les syndicats, les organisations de la société civile, les entreprises, les organisations de villes et les gouvernements locaux sont d'accord unanimement sur le besoin urgent de coordonner efficacement les réponses globales pour traiter des abus à grande échelle des migrants, qui ont découlé des flux énormes de migrants, de réfugiés et de demandeurs d'asile au cours des deux dernières années, ainsi que pour trouver un cadre pour une migration de travail juste, sûre et régulière".

"Cette décision abdique le leadership américain sur une question critique des droits humains", a déclaré Cathy Feingold, directrice internationale de l'AFL-CIO. "Cela permet également à l'administration de Donald Trump de continuer à faire avancer un programme qui criminalise les travailleurs migrants dans notre pays et se détourne des personnes fuyant la violence et la persécution".

Il ne fait aucun doute que l'ampleur de la migration mondiale est phénoménale. Quelque 244 millions de personnes sont des migrants, vivant en dehors de leur pays de naissance, le nombre le plus élevé de l'histoire. On estime que 66% d'entre eux sont des travailleurs. 60 millions de personnes ont été déplacées de façon permanente par la guerre et les conflits. Il y a 400 000 Somaliens déplacés qui vivent au Kenya et 3 millions de Syriens déplacés sont dispersés à travers le Moyen-Orient et l'Europe. Des dizaines de milliers de migrants sont exposés à l'esclavage en Libye. Au cours des deux dernières décennies, plus de 60 000 adultes et enfants sont morts au cours de voyages migratoires sur des routes terrestres et maritimes dangereuses et périlleuses. En 2016, quelque 5 000 personnes se sont noyées en tentant de traverser la Méditerranée depuis l'Afrique du Nord dans des embarcations périlleuses. Des familles ont fui la pauvreté et la violence en Amérique centrale. En 2017, il y a eu une augmentation de 17% des décès enregistrés de migrants le long de la frontière entre les États-Unis et le Mexique.  

La migration est clairement un phénomène mondial, alimenté par les difficultés économiques et la recherche d'opportunités économiques viables, ainsi que par les conflits politiques, les guerres et les catastrophes environnementales. Souvent, le tribut de la souffrance humaine est élevé et, de plus, les morts et les disparitions le long des routes migratoires sont des événements trop fréquents. Garantir les droits humains et au travail, les protections critiques pour tous les migrants, indépendamment de leur statut migratoire, sont des impératifs importants qui devraient guider les politiques migratoires dans les pays d'origine, de transit et de destination. Ceci ne peut être réalisé que si tous les pays travaillent ensemble sur des mesures coordonnées ancrées dans les normes internationales des droits de l'homme et du travail pour réaliser les droits et promouvoir le bien-être de tous les travailleurs, nationaux et migrants. Des positions isolationnistes telles que celles proclamées par le gouvernement américain, basées sur des préoccupations de souveraineté nationale, sont totalement inadéquates pour promouvoir les objectifs sociétaux importants de cohésion sociale, d'inclusion et d'acceptation de la diversité qui devraient être au cœur des politiques migratoires. La souveraineté nationale doit être assortie d'une responsabilité sociale globale pour assurer des droits et des protections adéquats aux migrants et à leurs familles. Plus que jamais, le système multilatéral d'institutions et de droits humains pour la gouvernance mondiale doit être affirmé. Cela nous a servi contre toute attente, et la communauté internationale a réussi à maintenir un semblant de paix et de stabilité dans le monde au cours des 70 dernières années.

Il est encourageant que des acteurs multipartites aux États-Unis, dont de nombreuses fédérations syndicales, des organisations de la société civile, les maires de douze villes, se soient tous déclarés favorables à la poursuite du processus menant à l'adoption du Pacte Mondial sur la Migration.

Les gouvernements du monde entier doivent également combler le vide créé par le retrait des États-Unis, en renforçant leur détermination à travailler de concert pour un Pacte fondé sur les droits humains qui améliore considérablement la vie des travailleurs migrants et de leurs communautés d'origine et de destination.

Les syndicats mondiaux continueront à apporter leurs contributions dans le processus, représentant les voix et les aspirations des travailleurs. Comme indiqué dans notre document ‘Les exigences du Mouvement Syndicalen anglais correspondant à Labour Demands déposé pour les négociations, nous préconiserons un Pacte qui promeut un système équitable de migration de la main-d'œuvre et accorde aux travailleurs migrants des droits pleins et égaux à ceux des nationaux. Nous poursuivrons nos efforts pour que ce processus aboutisse à un Pacte que nous pouvons pleinement soutenir -un pacte centré sur la régularisation, la réinstallation humanitaire et des politiques qui favorisent le développement durable et le travail décent pour tous, dans les pays d'origine, de transit et de destination.